queen mary
reine d'écosse

photo & histoire Simon Chadwick

 

La meilleure manière de relever un instrument s'avère souvent d'en faire la projection sur un plan:
c'est précisément l'image obtenue par un scanner.
Les clichés de la Queen Mary rassemblés par Karen Loomis au Queen’s Medical Research Institute ont cette vertu.
La coupe transversale permet de vérifier le grand soin du relevé de Robert B. Armstrong (1904). La colonne, débitée dans une pièce torve de même courbure, ayant ployé sous la pression prolongée du plan de cordes, la console s'est affaissée d'autant. Sa proposition de l'état initial tient compte de différentes déformations et restitue une position des assemblages vraisemblable.
Par contre, dans tous ses relevés, les chevilles sont positionnées différemment. Le scan permet de lever cette ambigüité, de préciser l'emplacement des cordes sur la table puis d'affiner une approche de l'état initial.

Relevé des arcs.

L'arc de l'épaule est le même que celui des chevilles;
celui de l'extérieur de la colonne est 4 fois plus grand;
le haut de la console vaut les 2/3.
L'arc des chevilles tangente le haut d'un carré centré sur le rayon médian de l'arc de la colonne.

Il est alors possible:
- d'en mesurer les diamètres: 12", 48" et 8";
- de constater une valeur du pied de 30,48 cm;
- de les nommer: G, GG+ et D.

Un arc d'ouverture 18", CC, marque l'intérieur de la colonne.
Celui qui limite le bas de la console fait environ 7".
D'après Armstrong, les diamètres des ornements sont de 3" sur la colonne et 4" sur les éclisses.
L'ensemble des traits, arcs et centres, se trouve dans les limites de l'épure.

L'angle de la caisse.

Il suit la diagonale d'un triangle 24"-27", soit 8-9-12 (√145=12,041), pratiquement un triangle de Pythagore dont la valeur des côtés respecte le poids de ses marteaux!
Cet angle se retrouve sur le tracé de William Beauford, sans qu'il n'en donne l'explication.
Il précise cependant, que "le triangle ABC représente la coupe de la harpe" et que "AB, l'axe de la console, représente un monocorde".
Á noter que la plus longue corde BC, 7èmedièse ou 8vebémol, est liée par un rapport de 22/7 au monocorde AB. Pour AB = 12", accordé G, sa valeur est inférieure de moins d'1/48 de pouce au BB théorique.

Dans le cas de la Quenn Mary, se retrouve le même principe avec des cordes perpendiculaires à l'axe de la console.
Á la corde BC correspond alors la valeur de F.

Les 4 octaves.

La tessiture de 4 octaves diatoniques sur 29 cordes est caractéristique des harpes baroques dans toute l'Europe.
Les octaves graves et aiguës des Anciens sont encadrés par ceux des super graves et des super aiguës, soit:

GG AA BB CC DD EE FF Γ A B C D E F G a b c d e f g aa bb cc dd ee ff gg
24" 18" 16" 12" 9" 8" 6" 3"

Γ, dit GammaUt, base théorique, est indifféremment solfié Gsolréut ou Csolfaut.

Partitions du plan de cordes.

Les déformations du bois sous la tension ont eu peu d'effet sur la distribution du plan de cordes.

Le G de 6" reste vertical, correspond à sa longueur théorique et constitue le pivot de la distribution des cordes.
Sur l'axe de la console, les cordes semblent espacées de 3"/7 pour les 2 octaves aiguës et de 3"/8 pour les 2 octaves graves.
Le long de la caisse, l'octave aiguë plus une quinte descendante, seraient espacés de 2"/3, puis de 6"/7 du C au CC et les 3 plus graves, de 7"/9.

Le report des longueurs théoriques permet de vérifier que les aiguës suivent d'assez près la juste proportion. Les plus graves sont inférieures à leur longueur théorique, mais la longueur du bourdon est très proche de la moitié de sa valeur théorique.

más lo que falta...

De nombreux aspects du processus de tracé et de ses correspondances théoriques restent encore obscurs.
Cependant, la relation avec le tracé de W. Beauford éclaire de nombreux aspects de la conception. En cette fin du 18ème siècle, s'il propose une amélioration du tracé de la console à l'aide des cycloïdes, il s'appuie toujours sur des usages bien établis, qui vont sans dire, dont il dévoile quelques aspects.

Il est toutefois remarquable que la distribution des 2 octaves supérieurs, à la juste proportion, symétriquement axée sur le G, propre à nombre de harpes médiévales soit encore et toujours en vigueur à cet époque. Avec l'étude des anciennes harpes conservées en musées, cela confirme l'étonnante persistance d'une tradition qui évolue progressivement sans jamais être remise en cause tout du long de l'histoire de la facture gaëlique.

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William Beauford, An essay on the construction and capability of the irish harp,
n°8 in Historical memoirs of the irish bards, Joseph C. Walker, Dublin 1786. p.344.

Under this consideration, let the triangle ABC (Fig. I.) represent the section of the Harp. AB the axis of the arm, which divide into four equal parts, AE, EI, IE, and FB, according to the ancient division of the Chromatic Scale of the Greeks. These people, and I believe most of the ancients, except the Phrygians, who considered the 5th, made the 4th, and not the octave, the fundamental of their musical scale; wherefore, if AB represents a monochord, Al will be a 4th, and AE, EI, IF, and FB, each minor 3ds; and AB sharp 7th or flat 8th, by a quarter tone.

Il faut noter que la Fig. 1 imprimée ne correspond pas à celle qui se construit en suivant strictement les indications du texte. En particulier, les diamètres des cercles générateurs des cycloïdes (PM, On et dc) sont dessinés bien en deçà de leurs valeurs réelles. Pour une valeur AB de 1 pied, les tracés desdites cycloïdes correspondent à des arcs d'ouvertures 12", 8" et 3".